C comme CHARNEAU : la maison MAUCOURANT

Pour ce ChallengeAZ 2023, je retrace l’histoire des maisons du village où j’ai grandi : Marigny, commune de Montreuillon dans la Nièvre.

La maison MAUCOURANT, comme je l’appellerai ici, appartenait en 1839, date de l’établissement du cadastre sur la commune de Montreuillon, à la famille PORTIER.

La maison MAUCOURANT – Collection personnelle

Pierre LABORDE et les CHAPUIS

Les frères et sœurs CHAPPUIS d’Oussy ont acquis la maison de Pierre LABORDE, époux de Jeanne MEGROT, qui possédait aussi les maisons BOUARD (lettre D) et de la Jeanne (lettre J). Pierre et Jeanne ont vécu à Jeaux, commune de Mhère, puis à Lormes.

Le 15 novembre 1831, Guillaume CHAPPUIS et sa femme Reine PETITIMBERT, Jean MIRIAUX et sa femme Jeanne CHAPPUIS, ainsi que Jean CHAPPUIS, demeurant tous à Oussy, vendent la maison à Pierre PORTIER, propriétaire à Marigny (il vivait jusque là dans la maison aujourd’hui détruite derrière chez ma grand-mère – lettre W) :

« Une maison située audit Marigny, consistante en une seule chambre a foyer, grenier dessus, cour pardevant, une ouche par derriere contenant environ six ares, une écurie joignant ladite maison et une grange joignant cette écurie, le tout tenant ensemble du levant à l’ouche de Pierre Bouchépillon, a celle de Jean Bonnet et aux jardins de Pierre Theureau et d’Antoine Colas, du midy a la rue Chisiaux, à l’ouche de la veuve Antoine Porthier et au pré de l’acquéreur, du couchant à la cour dudit acquéreur et au jardin de Philibert Boulandet et du nord à la maison et à la cour dudit Theureau.« 

Pierre PORTIER

C’est ainsi mon ancêtre Pierre PORTIER qui l’occupe en 1839. Il s’agit de la parcelle G8-111, qui correspond aujourd’hui à une partie de la parcelle AD62.

Pierre PORTIER est né le 8 septembre 1773 à l’Haut de la Chaux, paroisse de Mhère. Il a épousé Marie BILLARDON le 16 juin 1793 à Montreuillon ; celle-ci est née à Marigny le 25 septembre 1777. Par la suite, le père de Pierre, Philibert PORTIER, épousera la mère de Marie, Marie GRAILLOT, le 5 février 1782 à Mhère !

Leur descendance conservera la maison jusqu’en 1948 environ, sur six générations :

Le couple PORTIER-BILLARDON vit d’abord à l’Haut de la Chaux où naissent leurs trois premiers enfants, avant de s’installer à Marigny entre 1809 et 1812, où naissent les deux suivants.

  • Philippe dit Dominique, l’aîné, va rester vivre dans la maison familiale avec son épouse Reine TARTRAT ;
  • Marie ira s’installer à Arringette avec son mari ;
  • Mon ancêtre Marguerite ainsi que Marie, la petite dernière, partiront à Daumont ;
  • Quant à Nicolas, il va aussi rester à Marigny, dans une maison qui n’existe plus aujourd’hui et qui se trouvait entre celle de ma grand-mère et la maison MAUCOURANT (lettre W). Le couple habitera ensuite la maison LABORDE (lettre L) avant de partir à Dun-sur-Grandry en 1866.

Pierre et Marie font donation de leurs biens à leurs cinq enfant le 15 décembre 1839 devant Me BALIVET à Lormes.

Pierre PORTIER décède le 1er octobre 1841 à Marigny à l’âge de 68 ans, puis Marie BILLARDON le 9 mars 1853 à l’âge de 75 ans.

Philippe dit Dominique PORTIER

Le partage des biens est effectué le 6 janvier 1843, toujours devant Me BALIVET, peu après le décès du père de famille. C’est Philippe dit Dominique PORTIER, le fils aîné, qui hérite de la maison avec son épouse Reine TARTRAT. Je ne leur connais qu’une fille, Marie, née en 1826 à Marigny.

La jeune Marie PORTIER épouse Pierre PETITIMBERT le 30 juin 1842 à Montreuillon, Pierre étant né à Oussy en 1814. Le couple aura deux filles : Marguerite en 1843, et Philomène Reine en 1848.

Le 16 juin 1844, Philippe et Reine récupèrent la part d’héritage de leur sœur et belle-sœur Marie PORTIER, épouse de Benoît TARTERAT, qu’ils échangent contre les biens de Reine situés à Arringette. Cette part contient entre autres choses la grange avec ses aisances.

Marguerite, l’aînée des petites-filles, épouse Claude dit Charles PETITIMBERT le 30 avril 1860 à Montreuillon. Claude est né en 1839 à Vauclaix. Dans un premier temps, le couple s’installe à Marigny, où naîtra leur fils Léon Frédéric PETITIMBERT en 1867.

La maison est détruite au cours d’un incendie en 1866. Dominique PORTIER la reconstruit en 1867 (la parcelle G8-111 est alors modifiée pour devenir G8-411).

Philomène, la plus jeune des filles, épouse François BRANCHEREAU le 24 février 1868 à Montreuillon. François est né en 1836 à Montliffé, commune de Cervon. C’est là-bas que le couple s’installe, même si c’est chez ses parents à Marigny que Philomène accouche d’une petite Marie en 1870. Malheureusement Philomène se retrouve veuve dès le 30 septembre 1874 : François décède à Montliffé à l’âge de seulement 37 ans. Elle restera quelque temps à Montliffé avec sa fille mais finira par revenir à Marigny, comme nous le verrons plus tard.

Entre temps, les grands-parents sont décédés : Reine TARTRAT à Oussy le 27 octobre 1861 à l’âge de 60 ans environ (Reine habite alors à Oussy et son mari à Marigny… j’avoue ne pas être sûre de l’interprétation à donner. Le couple s’était-il séparé ?) ; Philippe PORTIER à Marigny le 9 février 1876 à l’âge de 76 ans.

Pierre PETITIMBERT

En 1876, suite au décès de son père, c’est Marie PORTIER qui hérite de la maison avec son époux Pierre PETITIMBERT. La maison de Marigny est alors habitée par :

  • Pierre PETITIMBERT et son épouse Marie PORTIER
  • leur fille Marguerite, son mari Claude ou Charles PETITIMBERT, et leur fils Frédéric
  • deux domestiques Charles BOUCHE et Joseph GOGUELAT

C’est toujours le cas en 1881, mis à part que les domestiques sont alors Philippe BLANDIN et Jeanne BRAUSSIER.

Philomène PETITIMBERT

Le 11 février 1884, Pierre PETITIMBERT et Marie PORTIER font donation de leurs biens à leurs deux filles Marguerite et Philomène. A cette date, Marguerite est partie habiter à Oussy avec son mari Claude PETITIMBERT et leur fils Frédéric, tandis que Philomène est revenue de Montliffé pour vivre à Marigny chez ses parents avec sa fille Marie.

Marguerite et Philomène procèdent au partage de ces biens dans la foulée. C’est Philomène qui obtient le deuxième lot, contenant :

« 1° Un corps de bâtiments d’habitation et d’exploitation se composant de chambre d’habitation, basserie, écurie, grange, poulailler, bergerie, cour devant, jardin derrière, le tout contenant environ quatre ares joint de nord à Léonard Theureau, de midi à Laborde de levant Colas et de couchant un chemin
2° Une grange et une écurie, cour devant aisances et dépendances joignant de nord Colas Etienne et de midi à Petitimbert Etienne.
« 

Philomène signe un bail le 2 mars 1884 avec Philippe BLANDIN, qui était domestique de la famille lors du recensement de 1881. Le bail comprend tous les biens lui appartenant sauf la maison d’habitation, le jardin, les bois et les buissons. Il sera résilié dès le 8 mai 1886.

La famille va par la suite accueillir un enfant assisté, élève de l’hospice de Nevers, Alfred SURUGUES. Alfred est né le 28 juillet 1881 à Nevers, il est fils naturel d’Emélie SURUGUES. Le petit garçon est placé dans la famille PETITIMBERT à Marigny et il y restera la majeure partie de sa vie.

Ainsi en 1886, on retrouve dans la maison Pierre PETITIMBERT et son épouse Marie PORTIER, leur fille Philomène et sa fille Marie BRANCHEREAU, un domestique Albert PELLEVE et le petit Alfred SURUGUES.

Marie BRANCHEREAU épouse Pierre CHARNEAU le 15 juin 1886 à Montreuillon. Pierre est originaire de Jerault, commune de Vauclaix, où il est né en 1863. Il a été dispensé du service militaire pour frère au service (matricule 1268 de la classe 1883 au bureau de Cosne).

Fiche matricule de Pierre CHARNEAU – AD58

Pierre PETITIMBERT décède trois jours après la noce de sa petite-fille, le 18 juin 1886 à Marigny à l’âge de 71 ans ! Pierre CHARNEAU devient donc chef de ménage au lendemain de son mariage, même si sa belle-mère reste propriétaire de la maison. Le couple aura trois enfants : Léonard en 1887, Reine en 1894 et Auguste en 1900.

Pierre CHARNEAU semble utiliser « Gilbert » comme prénom d’usage, car c’est celui qu’on retrouve dans plusieurs recensements, dont celui de 1891 qui mentionne :

  • Gilbert CHARNEAU, son épouse Marie BRANCHEREAU et leur fils Léonard
  • la grand-mère Marie PORTIER
  • la belle-mère Philomène PETITIMBERT
  • un domestique Pancrace CLEMENT
  • l’élève de l’hospice Alfred SURUGUES

En 1896, les domestiques sont Jean FLORET et Claude TOURNOIS. Alfred SURUGUES est absent.

La grand-mère Marie PORTIER décède à son tour le 26 juin 1899 à Oussy chez son gendre Claude PETITIMBERT.

Lors du recensement de 1901 on retrouve donc le couple avec leurs deux enfants, la grand-mère Philomène et Alfred SURUGUET, à présent domestique de la famille.

Le jeune Alfred fait partie de la classe 1901 (matricule 756 à Cosne). Il aura un parcours militaire très mouvementé :

  • Il est incorporé au 37e Régiment d’Artillerie fin 1902 en tant que 2e canonnier conducteur.
  • Il est condamné le 21 février 1903 par le conseil de guerre de la 8e région à la peine d’un an de prison pour vol au préjudice d’un militaire. Il obtient une remise de peine de deux mois et est ainsi libéré le 22 novembre 1903.
  • Il passe alors chasseur au 2e Bataillon d’Afrique, puis à nouveau 2e canonnier conducteur au 16e Régiment d’Artillerie le 11 mai 1905.
  • Il manque aux appels le 10 novembre 1905 et est déclaré déserteur le 16. Il est rayé des contrôles de la désertion le 30.
  • Il est à nouveau condamné le 23 janvier 1906, cette fois à 18 mois de prison pour vol au préjudice d’un militaire, recel d’une somme de 10F provenant d’un vol et désertion à l’intérieur en temps de paix. Il obtient une réduction de peine d’un mois et est libéré le 28 avril 1907.
  • Il passe alors à nouveau au 2e Bataillon d’Infanterie Légère d’Afrique, jusqu’à sa mise en disponibilité le 9 octobre 1907.
  • Sans surprise, le certificat de bonne conduite lui sera refusé.
  • Au retour de son laborieux service militaire, Alfred SURUGUES ira vivre à Méry-sur-Yonne puis à Auxerre.
  • Mobilisé à la déclaration de la Première Guerre Mondiale, il décédera à Réméréville (54) le 13 septembre 1914 suite de blessures de guerre.
Fiche matricule d’Alfred SURUGUES – AD58
Alfred SURUGUES, Mort pour la France – Mémoire des Hommes

En 1902, Pierre CHARNEAU achète la maison voisine, dite maison de la Jeanne (lettre J). La famille reste cependant dans la maison familiale.

Début mai 1905, un incendie ravage une partie des bâtiments de Pierre CHARNEAU et de ses voisins. L’article publié dans L’Echo du Morvan précise que le feu a pris dans le bâtiment de Pierre CHARNEAU :

L’Echo du Morvan du 6 mai 1905 – AD58

La composition du foyer n’a pas changé en 1906, mis à part Alfred qui n’apparaît plus (il est à cette date en prison).

Léonard CHARNEAU, l’aîné des enfants, fait partie de la classe 1907 (matricule 1409 à Nevers). Il est incorporé au 10e Régiment d’Infanterie de fin 1908 à fin 1910, et obtient le certificat de bonne conduite.

Fiche matricule de Léonard CHARNEAU – AD58

La grand-mère Philomène PETITIMBERT s’éteint le 18 mars 1910 à l’âge de 61 ans. Ainsi lors du recensement de 1911, seuls restent Pierre CHARNEAU, son épouse Marie BRANCHEREAU et leurs enfants Léonard et Auguste. Pierre dit Gilbert CHARNEAU décède à son tour le 1er avril 1913 à l’âge de 49 ans.

Léonard CHARNEAU

La Première Guerre Mondiale éclate en 1914 et Léonard est appelé au front. La situation va vite tourner court en ce qui le concerne, même s’il aura tout de même plus de chance qu’Alfred SURUGUES :

  • il est mobilisé en 1914 ; il passe aux armées, unité combattante du 210e Régiment d’Infanterie, le 9 août 1914.
  • il est blessé le 27 novembre 1914 à 15h au Bois Brûlé, forêt d’Apremont (55) d’une balle à la main gauche au cours d’une attaque d’une tranchée ennemie.
  • il est évacué pour blessure de guerre le jour-même, à l’hôpital auxiliaire n°11 Beau Site à Aix-les-Bains où il restera jusqu’au 13 mars 1915 ; il est ensuite transféré au dépôt des convalescents d’Aix-les Bains puis d’Auxonne jusqu’au 22 juillet 1915. A cette date il est envoyé dans ses foyers en congé de convalescence illimité.
  • Léonard est proposé pour la réforme avec gratification de 30% le 20 juillet 1915 pour blessure de guerre (fracture par balle de la tête du 1er métacarpien, gêne fonctionnelle de la main gauche) ; il est réformé avec gratification de 300F le 27 janvier 1916.

Léonard finira donc la guerre à la maison.

Sa mère Marie BRANCHEREAU décède à son tour le 8 août 1917 à l’âge de 47 ans. C’est Léonard CHARNEAU qui devient propriétaire de la maison (vers 1921 d’après le cadastre, mais il est possible que ce soit antérieur).

Ce dernier épouse Amélie dite Louise LABOUR le 28 octobre 1919 à Blismes. Amélie est née en 1900 au Meuleau, commune de Blismes. Le couple aura deux enfants : Roger en 1920 et Louise en 1922.

Lors du recensement de 1921, Auguste, le jeune frère de Léonard, est au service militaire (qu’il a fait au sein du 109e Régiment d’Infanterie de mars 1920 à mars 1922). La maison est donc occupée par Léonard CHARNEAU, son épouse Louise LABOUR, leur fils Roger et une domestique Odette DUYCK.

Peu après, la romance entre Léonard CHARNEAU et Louise LABOUR tourne court (si tant est qu’elle ait jamais existé). Le couple entame une procédure de divorce. Ils ne se quittent sans doute pas en bons termes car en 1924, Léonard essaie de tuer son beau-père :

L’Echo du Morvan du 30 août 1924 – AD58
L’Echo du Morvan du 13 septembre 1924 – AD58

Cette histoire coûtera gros à Léonard CHARNEAU. Il met en vente son bétail et ses récoltes et cesse son activité :

L’Echo du Morvan du 22 novembre 1924 – AD58

Le divorce est finalement prononcé deux ans plus tard :

L’Echo du Morvan du 3 juillet 1926 – AD58

A compter de 1926, Amélie et les enfants ne figurent plus dans les recensements à Marigny. En 1931 Amélie LABOUR est de retour à Blismes au Buchot chez sa mère avec ses deux enfants. Après tout cela, Léonard CHARNEAU va aller s’installer dans la maison voisine, dite « maison de la Jeanne » (lettre J), que son père avait achetée en 1902.

La famille MAUCOURANT

A compter du 6 mars 1934, la maison sera louée à la famille MAUCOURANT (précédemment installée en Vaux). Pierre MAUCOURANT est né le 15 janvier 1901 à Montreuillon ; il a épousé Pauline GRAILLOT le 29 octobre 1927, elle-même étant née le 24 décembre 1902 à Montreuillon. (A noter que la mère de Pauline, Marie BACHELIN, était née à Marigny dans la Vieille Maison – lettre V). Le couple a eu un enfant prénommé André, né le 8 août 1928 à Montigny-en-Morvan.

Lors des recensements de 1936 et 1946, on retrouve ainsi dans la maison Pierre MAUCOURANT, son épouse Pauline GRAILLOT, leur fils André et une pupille Annette SAWICKA.

Les MAUCOURANT finiront par acheter l’ensemble de la propriété CHARNEAU (y compris la maison de la Jeanne) avant 1948. Pierre MAUCOURANT décédera le 2 juin 1968 à Marigny. Pauline lui survivra de nombreuses années : elle est décédée le 13 avril 1996 à Château-Chinon. Leur fils André, resté célibataire et devenu propriétaire de la maison vers 1966, décédera le 5 septembre 2020 à Château-Chinon.

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