Pour notre plus grand plaisir, l’association Geneatech a relancé les Généathèmes : chaque mois nous est proposé un thème d’écriture pour nous inspirer et faire vivre nos blogs. Le thème de mai 2022 est : Métiers rares, métiers anciens.
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Le flottage en Morvan
Pour ceux qui ne le sauraient pas encore, j’ai grandi dans le Morvan. Mon village est situé à deux pas de la rivière d’Yonne (qui a donné son nom au département voisin). Lorsque j’étais petite, notre instituteur, que je salue, nous avait fait faire une exposition sur le flottage du bois, qui a été une activité très importante de la région : le bois des forêts du Morvan était envoyé à Paris pour chauffer la capitale, et ce par voie d’eau.
Cette exposition nous avait permis de découvrir les différents métiers du bois, à travers des photos et surtout de vieux outils : ceux des forestiers d’abord, avec les scies de long et les passe-partout ; ceux des flotteurs ensuite, avec notamment les crocs de flottage.

Pour ceux qui ne connaîtraient pas cette activité, je me permets de copier le texte disponible sur l’excellent site patrimoinedumorvan.org :
Au XVIème siècle, s’implante en Morvan une nouvelle activité économique très importante pour la région et qui va perdurer jusqu’à 1914 : Le flottage du bois. A partir de 1550, alors que la population parisienne a triplé en cinquante ans, on décide d’exploiter les 47 000 hectares de forêts du Morvan pour alimenter Paris en bois de chauffage. Le transport du bois se fait exclusivement par voie d’eau. La technique utilisée est celle du flottage ‘à bûches perdues’. Les bûches, débitées dans les forêts morvandelles, sont jetées dans les ruisseaux et les cours d’eau de l’Yonne et de la Cure. Dans la région de Vermenton et de Clamecy, lorsque la rivière devient navigable, les bûches sont disposées de façon à construire d’immenses ‘trains de bois’, des sortes de radeaux de bûches, qui sont emportés par la Seine jusqu’aux ports de la capitale. En 1800, le Morvan fournit les 3/4 de la consommation parisienne.
Le premier train de bois morvandiau arrive dans la capitale le 21 avril 1547. Afin d’exploiter les forêts proches des ruisseaux et de permettre un transport plus efficace des bûches, tout un système d’étangs et de retenues d’eau a été aménagé. En effectuant des ‘lâchers’ d’eau à partir de ces retenues, on provoque des crues artificielles qui gonflent les ruisseaux et emportent les bûches. Si une seule étape était suffisante pour acheminer les bûches transportées par certaines grosses rivières comme la Cure ou le Beuvron, deux étapes sont parfois nécessaires pour les petits ruisseaux : Le ‘petit flot’ et le ‘grand flot’. Ainsi, la compagnie de la haute Yonne qui gère une très importante quantité de bois, organise un petit flot à la fin novembre ; celui-ci charrie les bûches du lieu de coupe à l’un des vingt-deux ports situés sur le cours supérieur de l’Yonne. Et au printemps, un grand flot permet de rassembler les bûches pour les acheminer aux ports de constructions des trains de bois.
Le flottage mobilise hommes femmes et enfants pour la coupe, le charroi, l’empilage, le jetage, les récupérations intermédiaires. La population y trouve un complément indispensable de ressources. Mais le flottage profite d’abord aux grands propriétaires forestiers (les grands nobles et leurs successeurs) et aux marchands qui organisent le trafic.

N’hésitez pas si vous en avez l’occasion à aller visiter l’Ecomusée du Flottage à Clamecy (58).
Mes ancêtres et le flottage en Morvan
Au cours de mes recherches généalogiques, je m’attendais donc à trouver des ancêtres flotteurs… mais ce fut sans succès, pas un flotteur à l’horizon parmi mes ancêtres morvandiaux.
Enfin, ce n’est pas tout à fait vrai, j’ai bien trouvé quelques ancêtres qui vivaient du flottage, au sens où ils étaient marchands de bois ou facteurs (leurs agents sur le terrain). On pourra ainsi citer Claude BOUFFECHOUX (1690-1743), SOSA 1670 de mon fils, qui est décrit à son décès comme « facteur sur la riviere d’yonne pour Mrs les marchands pour la provision de Paris«

Je pense que d’autres de mes ancêtres étaient impliqués dans le commerce du bois au XVIIe siècle, même s’ils ne sont désignés que sous le terme de « marchands » sans autre précision dans les actes retrouvés : il s’agit des TRIDON, BEZAVE, MIRON et alliés.
Il s’agit là de marchands aisés, plus proches des grands propriétaires forestiers que des petites gens qui participaient au flottage pour arrondir leurs fins de mois et que j’imaginais initialement !
Un flotteur inespéré
Vous imaginerez ma surprise lorsque je suis tombée sur un flotteur dans une toute autre région et sur une toute autre branche de ma généalogie !
C’est en faisant des recherches sur ma branche maternelle que j’ai découvert Pierre SIMON (~1611-1656), SOSA 15850 de mon fils, que son acte de décès à Tigeaux (77) désigne comme flotteur :

Nous ne sommes plus sur la même rivière : ce n’est pas l’Yonne qui coule à Tigeaux mais le Grand Morin. Et ce n’est pas le bois des forêts du Morvan qu’on y acheminait, mais celui de la forêt de Crécy. Mais le concept est bien le même ! Tigeaux était un port de flottage très important, situé au point navigable le plus haut du Grand Morin.
Et c’est donc ainsi que j’ai trouvé un flotteur complètement inattendu, bien loin de mon Morvan natal.

Vraiment très intéressant. Merci pour le partage de ces recherches
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Merci beaucoup 😊
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Ton article est très instructif, merci !
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Merci Nat, contente que tu aies appris des choses grâce à mon article !
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Très intéressant comme toujours 🤩
Ton article m’a fait penser qu’un des beaux fils (Joseph FAYARD) de mon ancêtre Marie Françoise BREMANT est désigné dans son inventaire apres deces en 1809 (que j’ai consulté lundi dernier au CARAN) comme marchand de bois, responsable de l’approvisionnement de Paris. Il reste de nombreux contrat designant ce Joseph FAYARD et sa famille au CARAN, que je ne les ai pas encore consulté. Il serait intéressant de savoir de quel région vient le bois qu’il exploite. Sais-tu s’il y avait aussi des flotteurs à Paris ?
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Oh très intéressant, ça vaut le coup de creuser ! J’imagine qu’il devait y avoir des flotteurs ou équivalent pour réceptionner les trains de bois à Paris mais je ne me suis jamais renseignée sur le sujet à vrai dire.
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Superbe article … J’y suis d’autant plus sensible que j’ai un « compagnon de rivière » dans mon arbre et que ces deux métiers sont similaires
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Merci Véronique ! Ce sont des métiers oubliés qui nous rappellent des activités économiques qui ont pourtant été très importantes dans certaines régions.
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Coucou ! Super article qui m’intéresse grandement avec mes ancêtres de Château-Chinon et Arleuf qui l’ont exercé ! Et si tu as des Bouffechoux on est cousines !
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Rhô ! Mais ça m’intéresse ça ! Des Bouffechoux à Château-Chinon, c’est sûr qu’on est cousines en effet ! Tu as quels couples ? De mon côté j’ai Claude (x Marie BEZAVE), fils de Claude (x Lazare BERNARD), fils de Lazare (x Madeleine GRANDJEAN), qui serait fils de Pierre (x Edmée LEFEBVRE).
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Alors par les Bouffechoux ton Pierre serait le frère de mes Dimanche, Léonard (2x) et Lazotte Bouffechoux.
Ta Madeleine Grandjean est la nièce de ma Jeanne Grandjean !
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Et oui alimenter la capitale en bois, couper débiter, transporter !
Termes spécifiques flotteur, facteur, compagnon de rivière, que de découvertes lors de recherches généalogiques
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La généalogie c’est passionnant, ce n’est plus à prouver n’est-ce pas ? 😉
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Bel article, et qui fait résonner ma fibre québécoise. Chez nous, ça s’appelle la drave. Mon père a été draveur dans sa jeunesse. J’ai trouvé ce film de l’Office National du Film du Canada, réalisé en 1957, et qui montre les différentes étapes, depuis les forêts jusqu’aux usines. Ca devait ressembler à ça aussi dans le Morvan. Un métier pour les braves !
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Wow la vidéo est impressionnante ! Je n’imagine pas le nombre d’accidents qu’il pouvait y avoir quand je les vois courir sur les rondins 😱
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Voilà une jolie découverte qui nous fait flotter mais pas couler !
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Merci Marie pour ce joli commentaire !
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Super intéressant ! Je n’ai pas encore croisé de flotteurs dans ma branche icaunaise pourtant installée pas très loin de la rivière. Mais beaucoup plus au nord du dépt.
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Merci Béatrice ! Ce n’est peut-être qu’une question de temps avant d’en trouver, qui sait ?
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